L’agriculture biologique est un système de production destiné notamment à répondre aux dommages environnementaux de certaines pratiques de l’agriculture conventionnelle, en favorisant le cycle des ressources, l’équilibre écologique et en préservant la biodiversité. Petit tour d’horizon de l’agriculture biologique, son histoire, les méthodes et ses principales limites.

L’agriculture biologique, c’est quoi ?

L’agriculture biologique est un système agricole né au début du 20e siècle en réaction à l’évolution rapide des pratiques agricoles. Elle se définit par l’utilisation de fertilisants d’origine organique, tels que le fumier, le compost, l’engrais naturel ou encore la farine d’os. Elle met également l’accent sur des techniques telles que la rotation des cultures et la plantation d’accompagnement. La lutte biologique antiparasitaire, la polyculture et l’élevage d’insectes prédateurs sont par ailleurs encouragés.

L’agriculture biologique moderne a été développée en réponse aux dommages environnementaux causés par l’utilisation de produits chimiques, pesticides et engrais synthétiques dans l’agriculture conventionnelle. Par rapport à cette dernière, l’agriculture biologique :

  • utilise moins de pesticides,
  • réduit l’érosion des sols,
  • diminue le lessivage des nitrates dans les eaux souterraines et les eaux de surface,
  • recycle les déchets animaux de la ferme.

Ces avantages sont néanmoins contrebalancés par des normes contraignantes et des rendements généralement plus faibles. En effet, les rendements des cultures biologiques sont globalement inférieurs d’environ 8 à 25% à ceux des cultures conventionnelles, bien que cela puisse varier considérablement selon le type de culture.

Ces inconvénients majeurs de l’agriculture biologique se traduisent la plupart du temps par des prix de vente au consommateur généralement plus élevés.

Le défi pour l’agriculture biologique de demain sera de maintenir ses avantages environnementaux, d’augmenter les rendements et de réduire les prix tout en relevant les défis du changement climatique et de l’augmentation de la population mondiale.

Histoire

agriculture-biologique

Les concepts de l’agriculture biologique ont été développés au début des années 1900 par une poignée de visionnaires, dont Sir Albert Howard, Raoul Lemaire et Rudolf Steiner, qui pensaient que le fumier composté, les cultures de couverture, la rotation des cultures et la lutte biologique contre les ravageurs pouvaient améliorer le système agricole.

Howard, ayant travaillé notamment en Inde en tant que chercheur agronome, s’est beaucoup inspiré des pratiques agricoles traditionnelles et durables qu’il a rencontrées dans cette région du monde et a plaidé pour leur adoption en Occident. Certaines d’entre elles ont été promues par divers défenseurs du concept à partir des années 1940.

Dans les années 1960, en raison de l’étendue désormais notoire des dommages environnementaux causés par les pesticides, fongicides et insecticides, la demande en aliments biologiques a été largement stimulée. Les ventes d’aliments biologiques ont ainsi augmenté régulièrement à partir de la fin du 20e siècle. Une plus grande sensibilisation à l’environnement, associée aux préoccupations relatives à l’impact sur la santé des résidus de pesticides et la consommation de produits génétiquement modifiés (OGM), a favorisé la croissance du secteur biologique.

Ainsi, aux États-Unis, les ventes au détail sont passées de 20,39 milliards de dollars en 2008 à 47,9 milliards de dollars en 2019, tandis que les ventes en Europe ont atteint plus de 47,75 milliards de dollars (40 milliards d’euros) en 2018.

Le prix des aliments biologiques est généralement plus élevé que celui des aliments cultivés de manière conventionnelle. Selon le produit, la saison et les aléas de l’offre et de la demande, le prix des aliments biologiques peut être en moyenne jusqu’à 75 % plus élevé que celui des produits de l’agriculture conventionnelle.

Régulation de l’agriculture biologique

agriculture-biologique

L’agriculture biologique est définie formellement par les gouvernements. Les agriculteurs doivent être certifiés pour que leurs produits soient étiquetés « biologiques » (Label AB en France, Eurofeuille pour l’UE). Par ailleurs, il existe des normes biologiques spécifiques pour les cultures, les animaux d’élevage et les produits sauvages, ainsi que pour la transformation des produits agricoles.

Les normes biologiques de l’Union européenne (UE) et des États-Unis, par exemple, interdisent l’utilisation de pesticides et d’engrais synthétiques, des rayonnements ionisants (pasteurisation à froid, ou irradiation), de boues d’épuration non valorisées pour les épandages agricoles et de plantes ou produits génétiquement modifiés.

Dans l’UE, la certification et l’inspection biologiques sont opérées par des organismes de contrôle biologique agréés conformément aux normes établies par l’UE.

Bien que la plupart des pays aient leurs propres programmes de certification biologique, les certificateurs de l’UE peuvent néanmoins inspecter et certifier les producteurs et transformateurs d’autres pays. Une approche particulièrement utile lorsque les produits cultivés biologiquement dans d’autres pays sont exportés vers l’UE.

Méthodes d’agriculture biologique

Les engrais organiques

Étant donné que les engrais de synthèse sont interdits, la construction et le maintien d’un sol riche et vivant par l’ajout de matière organique est une priorité pour les agriculteurs biologiques. Les différentes sources de matière organique peuvent être l’application de fumier, de compost et de sous-produits animaux, tels que la farine de plumes ou la farine de sang.

Le compost permet d’appliquer de la matière organique, fournissant un large éventail de nutriments pour les plantes, et ajoute des microorganismes bénéfiques au sol. Comme ces nutriments sont pour la plupart sous une forme non minéralisée qui ne peut pas être absorbée par les plantes, les microorganismes du sol sont nécessaires pour décomposer la matière organique et transformer les nutriments en un état « minéralisé » biodisponible. En comparaison, les engrais synthétiques sont déjà sous forme minéralisée et peuvent être directement absorbés par les plantes.

Le sol est entretenu par la plantation puis le labour dans des cultures de couverture, qui aident à protéger le sol de l’érosion hors saison et fournissent de la matière organique supplémentaire. Le labour de cultures de couverture fixatrices d’azote, comme le trèfle ou la luzerne, ajoute également de l’azote au sol.

Les cultures de couverture sont généralement plantées avant ou après la saison des cultures de rente ou en conjonction avec la rotation des cultures. Elles peuvent également être plantées entre les rangs de certaines cultures, comme les arbres fruitiers, ou dans le cadre de l’agroforesterie.

Chercheurs et producteurs poursuivent toujours leurs recherches pour développer des nouvelles pratiques de non-labour en agriculture biologique afin de réduire encore davantage l’érosion des sols.

Lutte antiparasitaire

coccinelles

Les pesticides organiques sont dérivés de sources naturelles. Il s’agit notamment d’organismes vivants tels que la bactérie Bacillus thuringiensis, qui est utilisée pour lutter contre les chenilles nuisibles, ou de dérivés végétaux comme les pyréthrines (provenant des capitules séchés de pyrèthre de Dalmatie - Chrysanthemum cinerariifolium) ou l’huile de neem (provenant des graines de margousier - Azadirachta indica). Les pesticides inorganiques à base de minéraux tels que le soufre et la cuivre sont également autorisés.

En plus des pesticides, la lutte antiparasitaire biologique intègre des contrôles biologiques, culturaux et génétiques pour minimiser les dommages causés par les ravageurs. La lutte biologique utilise les ennemis naturels des ravageurs, tels que les insectes prédateurs (par exemple, les coccinelles), ou les parasitoïdes (par exemple, certaines guêpes) pour attaquer les insectes ravageurs.

Par ailleurs, les cycles des ravageurs peuvent être perturbés par les contrôles des cultures, dont la rotation des cultures est la plus largement utilisée.

Enfin, la sélection végétale traditionnelle a produit de nombreuses variétés de cultures résistantes à des ravageurs spécifiques. L’utilisation de telles variétés et la plantation de cultures génétiquement diverses permettent un contrôle génétique contre les ravageurs et de nombreuses maladies des plantes.

 bouton-devis

Principales limitations de l’agriculture biologique

Bien que l’agriculture biologique ait pleinement démontré son aptitude à favoriser la biodiversité et à améliorer l’efficacité de la gestion des sols, induisant de fait sa capacité à atténuer voire à inverser les effets du changement climatique par la réduction des émissions de combustibles fossiles, elle n’en présente pas moins certaines limites. En voici quelques-unes.

Dépendance du travail du sol

L’un des pesticides qui fait presque totalement défaut au biologique est l’herbicide. Cela signifie que pour de nombreuses cultures biologiques, le seul moyen de lutter contre les mauvaises herbes est mécanique (labour, hersage, binage…), par le feu ou encore robotisé (qui implique des coûts substantiels).

La meilleure pratique est le non-labour ou des variantes de cette méthode. Combinée avec des cultures de couverture, elle permet d’améliorer la qualité du sol sans avoir besoin de grandes quantités d’intrants organiques. Mais cette technique n’est pleinement viable qu’à petite échelle.

Dépendance vis-à-vis de l’élevage intensif d’animaux

Même si les agriculteurs bio fournissent une partie importante de leur azote via les cultures de légumineuses, il est toujours nécessaire d’appliquer davantage d’azote pour de nombreuses autres cultures. Cet azote provient principalement de sources animales (fumier, fumier composté, farine de poisson, farine de sang, farine d’os…).

Ironiquement, le fumier/compost provient la plupart du temps de fermes d’élevage intensif afin de pouvoir le collecter de manière suffisante. Les autres sources biologiques sont plus onéreuses et également limitées.

Incapacité à nourrir tout le monde et risque de déforestation

L’agriculture biologique produit généralement moins de nourriture par hectare. Ce rendement plus faible implique que nourrir le monde de manière biologique nécessiterait davantage de terres. Mais les bonnes terres agricoles sont limitées. Et la communauté scientifique estime que l’augmentation des terres nécessaires pour cultiver des aliments biologiques pourrait potentiellement détruire les forêts et anéantir de nombreux écosystèmes, influençant ainsi drastiquement le dérèglement climatique par la disparition de nos puits de carbone.